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Madame de Stael - De l'Allegmagne
pouvais-je endurcir ce coeur que le ciel avait cre?
e?
pour aimer?
, Situ veux manifester ta puissance, prends pour organes ceux
<<qui, de? gage? s du pe? che? , habitent dans ta demeure e? ternelle;
"envoie tes esprits immortels et purs, e? trangers aux passions
? comme aux larmes. Mais ne choisis pas la faible fille, ne
? choisis point le coeur sans force d'une berge`re. Que me faisaient
<< les destins des combats et les querelles des rois! Tu as trou-
<< ble? ma vie, tu m'as entrai^ne? e dans les palais des princes , et
"la` j'ai trouve? la se? duction et l'erreur. Ah! ce n'e? tait pas moi
? qui avais voulu ce sort. >>
Ce monologue est un chef-d'oeuvre de poe? sie; un me^me senti-
ment rame`ne naturellement aux me^mes expressions, et c'est en
cela que les vers s'accordent si bien avec les affections de l'a^me:
far ils transforment en une harmonie de? licieuse ce qui pourrait
parai^tre monotone dans le simple langage de la prose. Le trou-
ble de Jeanne d'Arc va toujours croissant. Les honneurs qu'on
lui rend, la reconnaissance qu'on lui te? moigne, rien ne peut la
rassurer, quand elle se sent abandonne? e par la main toute-puis-
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? 238 JEANNE D'ARC.
sante qui l'avait e? leve? e. Enfin, ses funestes pressentiments s'ac-
complissent, et de quelle manie`re!
Il faut, pour concevoir l'effet terrible de l'accusation de sor-
cellerie , se transporter dans les sie`cles ou` le soupc? on de ce crime
myste? rieux planait sur toutes les choses extraordinaires. La
croyance au mauvais principe, telle qu'elle existait alors, sup-
posait la possibilite? d'un culte affreux envers l'enfer; les objets
effrayants de la nature en e? taient le symbole, et des signes bizar-
res le langage. On attribuait a` cette alliance avec le de? mon toutes
les prospe? rite? s de la terre dont la cause n'e? tait pas bien connue.
Le mot de magie de? signait l'empire du mal sans bornes, comme
la Providence le re`gne du bonheur infini. Cette impre? cation,
elle est sorcie`re, il est sorcier, devenue ridicule de nos jours,
faisait frissonner il y a quelques sie`cles; tous les liens les plus
sacre? s se brisaient, quand ces paroles e? taient prononce? es : nul
courage ne les bravait, et le de? sordre qu'elles mettaient dans
les esprits e? tait tel, qu'on eu^t dit que les de? mons de l'enfer ap-
paraissaient re? ellement, quand on croyait les voir apparai^tre.
Le malheureux fanatique pe`re de Jeanne, d'Arc est saisi par
la superstition du temps; et, loin d'e^tre fier de la gloire de sa fille,
il se pre? sente lui-me^me au milieu des chevaliers et des seigneurs
de la cour, pour accuser Jeanne d'Arc de sorcellerie. A l'instant,
tous les coeurs se glacent d'effroi; les chevaliers, compagnons
d'armes de Jeanne d'Arc, la pressent de se justifier, et elle se
tait. Le roi l'interroge, et elle se tait. L'archeve^que la supplie
de jurer sur le crucifix qu'elle est innocente, et elle se tait. Elle
ne veut pas se de? fendre du crime dont elle est faussement accu-
se? e, quand elle se sent coupable d'un autre crime que son coeur
ne peut se pardonner. Le tonnerre se fait entendre, l'e? pouvante
s'empare du peuple, Jeanne d'Arc est bannie de l'empire qu'elle
vient de sauver. Nul n'ose s'approcher d'elle. La foule se disperse;
l'infortune? e sort de la ville ;- elle erre dans la campagne, et lors-
que, abi^me? e de fatigue, elle accepte une boisson rafrai^chissante,
un enfant qui la reconnai^t arrache de ses mains ce faible soula-
gement. On dirait que le souffle infernal dont on la croit envi-
ronne? e peut souiller tout ce qu'elle touche, et pre? cipiter dans
l'abi^me e? ternel quiconque oserait la secourir. Enfin, poursuivie
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? JEANNE D'ARC. 239
d'asile en asile, la libe? ratrice de la France tombe au pouvoir de
ses ennemis.
Jusque-la` cette trage? die romantique, c'est ainsi que Schiller
l'a nomme? e, est remplie de beaute? s du premier ordre; on peut
bien y trouver quelques longueurs (jamais les auteurs allemands
ne sont exempts de ce de? faut); mais on voit passer devant soi
des e? ve? nements si remarquables, que l'imagination s'exalte a`
leur hauteur, et que, ne jugeant plus cette pie`ce comme ou-
vrage de l'art, on conside`re le merveilleux tableau qu'elle ren-
ferme comme un nouveau reflet de la sainte inspiration de l'he? -
roi? ne. Le seul de? faut grave qu'on puisse reprocher a` ce drame
lyrique, c'est le de? nou^ment : au lieu de prendre celui qui e? tait
donne? par l'histoire, Schiller suppose que Jeanne d'Arc, en-
chai^ne? e par les Anglais, brise miraculeusement ses fers, va
rejoindre le camp des Franc? ais, de? cide la victoire en leur faveur,
et rec? oit une blessure mortelle. Le merveilleux d'invention, a`
co^te? du merveilleux transmis par l'histoire, o^te a` ce sujet quel-
que chose de sa gravite? . D'ailleurs, qu'y avait-il de plus beau
que la conduite et les re? ponses me^mes de Jeanne d'Arc, lors-
qu'elle fut condamne? e a` Rouen par les grands seigneurs anglais
et les e? ve^ques normands?
L'histoire raconte que cette jeune fille re? unit le courage le
plus ine? branlable a` la douleur la plus touchante; elle pleurait
comme une femme, mais elle se conduisait comme un he? ros. On
l'accusa de s'e^tre livre? e a` des pratiques superstitieuses, et elle
repoussa cette inculpation avec les arguments dont une personne
e? claire? e pourrait se servir de nos jours; mais elle persista tou-
jours a` de? clarer qu'elle avait eu des re? ve? lations intimes, qui
l'avaient de? cide? e dans le choix de sa carrie`re. Abattue par l'hor-
reur du supplice qui la menac? ait, elle rendit constamment te? -
moignage devant les Anglais a` l'e? nergie des Franc? ais, aux vertus
du roi de France, qui cependant l'avait abandonne? e. Sa mort-
nc fut ni celle d'un guerrier ni celle d'un martyr; mais, a` travers
la douceur et la timidite? de son sexe, elle montra dans les der-
niers moments une force d'inspiration presque aussi e? tonnante
que celle dont on l'accusait comme d'une sorcellerie. Quoi qu'il
en soit, le simple re? cit de sa fin e? meut bien plus que le de? nou-
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? 240 LA FIANCE? E DE MESSINE.
ment de Schiller. Lorsque la poe? sie veut ajouter a` l'e? clat d'un
personnage historique, il faut du moins qu'elle lui conserve
avec soin la physionomie qui le caracte? rise; car la grandeur
n'est vraiment frappante que quand on sait lui donner l'air na-
turel. Or, dans le sujet de Jeanne d'Arc, c'est le fait ve? ritable
qui non-seulement a plus de naturel, mais plus de grandeur
que la fiction.
La Fiance? e de Messinea e? te? compose? e d'apre`sun syste`me dra-
matique tout a` fait diffe? rent de celui que Schiller avait suivi jus-
qu'alors, et auquel il est heureusement revenu. C'est pour faire
admettre les choeurs sur la sce`ne qu'il a choisi un sujet dans
lequel il n'y a de nouveau que les noms; car c'est, au fond, la
me^me chose que les Fre`res ennemis. Seulement Schiller a intro-
duit deplus une soeur dont les deux fre`res deviennent amoureux,
sans savoir qu'elle est leur soeur, et l'un tue l'autre par jalou-
sie. Cette situation terrible en elle-me^me est entreme^le? e de
choeurs qui font partie de la pie`ce. Ce sont les serviteurs des
deux fre`res qui interrompent et glacent l'inte? re^t par leurs dis-
cussions mutuelles. La poe? sie lyrique qu'ils re? citent tous a` la
fois est superbe; mais ils n'en sont pas moins, quoi qu'ils di-
sent, des choeurs de chambellans. Le peuple entier peut seul avoir cette dignite? inde? pendante, qui lui permet d'e^tre un spec-
tateur impartial. Le choeur doit repre? senter la poste? rite? . Si des
affections personnelles l'animaient, il serait ne? cessairement ri-
dicule; car on ne concevrait pas comment plusieurs personnes
diraient la me^me chose en me^me temps, si leurs voix n'e? taient
pas cense? es e^tre l'interpre`te impassible des ve? rite? s e? ternelles.
Schiller, dans la pre? face qui pre? ce`de la Fiance? e de Messine,
se plaint avec raison de ce que nos usages modernes n'ont plus
ces formes populaires qui les rendaient si poe? tiques chez les an-
ciens.
<< Les palais, dit-il, sont ferme? s; les tribunaux ne se tiennent
<< plus en plein air, devant les portes des villes; les e? crits ont
<< pris la place de la parole vivante; le peuple lui-me^me, cette
<< masse si forte et si visible, n'est presque plus qu'une ide? e abs-
<<traite, et les divinite? s des mortels n'existent plus que dans leur
? ?
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? LA FIANCEE DE MESSINE. 2-11
<<coeur. Il faut que le poete ouvre les palais, replace les juges
sous la vou^te du ciel, rele`ve les statues des dieux, ranime enfin
les images qui partout ont fait place aux ide? es. >>
Ce de? sir d'un autre temps, d'un autre pays, est un sentiment
poe? tique. L'homme religieux a besoin du ciel, et le poete d'une
autre terre : mais on ignore quel culte et quel sie`cle la Fian-
ce? e de Messine nous repre? sente: elle sort des usages modernes,
sans nous placer dans les temps antiques. Le poe`te y a me^le?
toutes les religions ensemble; et cette confusion de? truit la haute
unite? de la trage? die, celle de la destine? e qui conduit tout. Les
e? ve? nements sont atroces, et cependant l'horreur qu'ils inspirent
est tranquille. Le dialogue est aussi long, aussi de? veloppe? que
si l'affaire de tous e? tait deparler en beaux vers, et qu'on aima^t,
qu'on fu^t jaloux, qu'on hai? t son fre`re, qu'on le tua^t, sans quit-
ter la sphe`re des re? flexions ge? ne? rales et des sentiments philoso-
phiques.
Il y a ne? anmoins dans la Fiance? e de Messine des traces
admirables du beau ge? nie de Schiller. Quand l'un des fre`res a
e? te? tue? par son fre`re jaloux ,. on apporte le mort dans le palais
de la me`re; elle ne sait point encore qu'elle a perdu son fils,
et c'est ainsi que le choeur qui pre? ce`de le cercueil le lui an-
nonce:
<< De tout co^te? le malheur parcourt les villes. Il erre en si-
<< lence autour des habitations des hommes: aujourd'hui c'est
<< a` celle-ci qu'il frappe, demain c'est a` celle-la`; aucune n'est
? e? pargne? e. Le messager douloureux et funeste to^t ou tard pas-
? sera le seuil de la porte ou` demeure un vivant. Quand les
'? feuilles tombent dans la saison prescrite, quand les vieillards
<< affaiblis descendent dans le tombeau , la nature obe? it en paix
? a` ses antiques lois, a` son e? ternel usage, l'homme n'en est
? point effraye? ; mais sur cette terre, c'est le malheur impre? vu
qu'il faut craindre. Le meurtre, d'une main violente, brise
les liens les plus sacre? s, et la mort vient enlever dans la bar-
"que du Styx le jeune homme florissant. Quand les nuages
? amoncele? s couvrent le ciel de deuil, quand le tonnerre retentit
? dans les abi^mes, tous les coeurs sentent la force redoutable
? de la destine? e; mais la foudre enflamme? e peut partir des hau-
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? 242 LA FIANCE? E DE MESSINE.
<< teurs sans nuages, et le malheur s'approche comme un ennemi
<< ruse? , au milieu des jours de fe^te.
<< N'attache donc point ton coeur a` ces biens dont la vie passa-
<< ge`re est orne? e. Si tu jouis, apprends a` perdre, et si la fortune
<< est avec toi, songe a` la douleur. >>
Quand le fre`re apprend que celle dont il e? tait amoureux, et
pour laquelle il a tue? son fre`re, est sa soeur, son de? sespoir n'a
point de bornes, et il se re? sout a` mourir. Sa me`re veut lui par-
donner, sa soeur lui demande de vivre; mais il se me^le a` ses
remords un sentiment d'envie qui le rend encore jaloux de celui
qui n'est plus.
<< Ma me`re, dit-il, quand le me^me tombeau renfermera le
<< meurtrier et la victime, quand une me^me vou^te couvrira nos
<< cendres re? unies, ta male? diction sera de? sarme? e. Tes pleurs
<< couleront e? galement pour tes deux fils: la mort est un puis-
<<sant me? diateur! elle e? teint les flammes de la cole`re, elle re? -
<<concilie les ennemis, et la pitie? se penche comme une soeur
<< attendrie sur l'urne qu'elle embrasse. >>
Sa me`re le presse encore de ne pas l'abandonner. -- << Non ,
<< lui dit-il, je ne puis vivre avec un coeur brise? . Il faut que je
<< retrouve la joie, et que je m'unisse avec les esprits libres de
<< l'air. L'envie a empoisonne? ma jeunesse; cependant tu par-
<< tageais justement ton amour entre nous deux. Penses-tu que
<< je pusse supporter maintenant l'avantage que tes regrets ilon-
"uent a` mon fre`re sur moi? La mort nous sanctifie; dans son
>> palais indestructible, ce qui e? tait mortel et souille? se'change
<< en un cristal pur et brillant; les erreurs de la mise? rable hu-
<< manite? disparaissent. Mon fre`re serait au-dessus de moi dans
ton coeur, comme les e? toiles sontau-dessus de la terre, et l'an-
<<cienne rivalite? qui nous a se? pare? s pendant la vie, renai^trait pour
me de? vorer sans rela^che. 11 serait par dela` ce monde; il serait
<< dans ton souvenir l'enfant che? ri, l'enfant immortel. >>
La jalousie qu'inspire un mort est un sentiment plein de de? -
licatesse et de ve? rite? . Qui pourrait en effet triompher des regrets?
Les vivants e? galeront-ils jamais la beaute? de l'image ce? leste que
l'ami qui n'est plus a laisse? e dans notre coeur? Ne nous a-t-il
pas dit: -- Ne m'oubliez pas. -- i? \"est-il p;i^s la` sans de? fense? Ou`
/
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? GUILLAUME TELL. I? 43
vit-il sur cette terre, si ce n'est dans le sanctuaire de notre a^me?
Et qui, parmi les heureux de ce monde, s'unirait jamais a` nous
aussi intimement que son souvenir?
CHAPITRE XX. Guillaume Tell.
Le Cuillaume Tell de Schiller est reve^tu de ces couleurs vives
et brillantes qui transportent l'imagination dans les contre? es
pittoresques ou` la respectable conjuration du Ru`tli s'est passe? e.
De`s les premiers vers, on croit entendre re? sonner les cors des
Alpes. Ces nuages qui partagent les montagnes, et cachent la
terre d'en bas a` la terre plus voisine du ciel; ces chasseurs de
chamois poursuivant leur proie le? ge`re a` travers les abi^mes; cette
vie tout a` la fois pastorale et guerrie`re, qui combat avec la na-
ture, et reste en paix avec les hommes : tout inspire un inte? re^t
anime? pour la Suisse; et l'unite? d'action, dans cette trage? die,
tient a` l'art d'avoir fait de la nation me^me un personnage
dramatique.
La hardiesse de Tell est brillamment signale? e au premier acte
de la pie`ce. Un malheureux proscrit, que l'un des tyrans sub-
alternes de la Suisse a de? voue? a` la mort, veut se sauver del'au-tre co^te? du rivage, ou` il peut trouver un asile. L'orage est si
\ ioleat qu'aucun batelier n'ose se risquer a` traverser le lac pour
le conduire. Tell voit sa de? tresse, se hasarde avec lui sur les flots,
et le fait heureusement aborder a` l'autre rive. Tell est e? tranger
a` la conjuration que l'insolence de Gessler fait nai^tre. Stauffa-
cher, Walther Fu^rst et Arnold deMelchtal pre? parent la re? volte.
Tell en est le he? ros, mais non pas l'auteur; il ne pense point a`
la politique, il ne songe a` la tyrannie que quand elle trouble sa
vie paisible; il la repousse de son bras, quand il e? prouve son
atteinte; il la juge, il la condamne a` son propre tribunal; mais
il ne conspire pas. Arnold deMelchtal, l'un des conjure? s, s'est retire? chez Wal-
iher; il a e? te? oblige? de quitter son pe`re, pour e? chapper aux sa-
tellites de Gessler; il s'inquie`te de l'avoir laisse? seul; il demande
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? 2-M GUILLAUME TELL.
avec anxie? te? de ses nouvelles, quand tout a` coup il apprend que,
pour punir le vieillard de ce que son fils s'est soustrait au de? cret
lance? contre lui, les barbares, avec un fer bru^lant, l'ont prive?
de la vue. Quel de? sespoir, quelle rage peut e? galer ce qu'il e? prouve!
, Situ veux manifester ta puissance, prends pour organes ceux
<<qui, de? gage? s du pe? che? , habitent dans ta demeure e? ternelle;
"envoie tes esprits immortels et purs, e? trangers aux passions
? comme aux larmes. Mais ne choisis pas la faible fille, ne
? choisis point le coeur sans force d'une berge`re. Que me faisaient
<< les destins des combats et les querelles des rois! Tu as trou-
<< ble? ma vie, tu m'as entrai^ne? e dans les palais des princes , et
"la` j'ai trouve? la se? duction et l'erreur. Ah! ce n'e? tait pas moi
? qui avais voulu ce sort. >>
Ce monologue est un chef-d'oeuvre de poe? sie; un me^me senti-
ment rame`ne naturellement aux me^mes expressions, et c'est en
cela que les vers s'accordent si bien avec les affections de l'a^me:
far ils transforment en une harmonie de? licieuse ce qui pourrait
parai^tre monotone dans le simple langage de la prose. Le trou-
ble de Jeanne d'Arc va toujours croissant. Les honneurs qu'on
lui rend, la reconnaissance qu'on lui te? moigne, rien ne peut la
rassurer, quand elle se sent abandonne? e par la main toute-puis-
? ? Generated for (University of Chicago) on 2014-12-22 00:49 GMT / http://hdl. handle. net/2027/hvd. hwnks5 Public Domain, Google-digitized / http://www. hathitrust. org/access_use#pd-google
? 238 JEANNE D'ARC.
sante qui l'avait e? leve? e. Enfin, ses funestes pressentiments s'ac-
complissent, et de quelle manie`re!
Il faut, pour concevoir l'effet terrible de l'accusation de sor-
cellerie , se transporter dans les sie`cles ou` le soupc? on de ce crime
myste? rieux planait sur toutes les choses extraordinaires. La
croyance au mauvais principe, telle qu'elle existait alors, sup-
posait la possibilite? d'un culte affreux envers l'enfer; les objets
effrayants de la nature en e? taient le symbole, et des signes bizar-
res le langage. On attribuait a` cette alliance avec le de? mon toutes
les prospe? rite? s de la terre dont la cause n'e? tait pas bien connue.
Le mot de magie de? signait l'empire du mal sans bornes, comme
la Providence le re`gne du bonheur infini. Cette impre? cation,
elle est sorcie`re, il est sorcier, devenue ridicule de nos jours,
faisait frissonner il y a quelques sie`cles; tous les liens les plus
sacre? s se brisaient, quand ces paroles e? taient prononce? es : nul
courage ne les bravait, et le de? sordre qu'elles mettaient dans
les esprits e? tait tel, qu'on eu^t dit que les de? mons de l'enfer ap-
paraissaient re? ellement, quand on croyait les voir apparai^tre.
Le malheureux fanatique pe`re de Jeanne, d'Arc est saisi par
la superstition du temps; et, loin d'e^tre fier de la gloire de sa fille,
il se pre? sente lui-me^me au milieu des chevaliers et des seigneurs
de la cour, pour accuser Jeanne d'Arc de sorcellerie. A l'instant,
tous les coeurs se glacent d'effroi; les chevaliers, compagnons
d'armes de Jeanne d'Arc, la pressent de se justifier, et elle se
tait. Le roi l'interroge, et elle se tait. L'archeve^que la supplie
de jurer sur le crucifix qu'elle est innocente, et elle se tait. Elle
ne veut pas se de? fendre du crime dont elle est faussement accu-
se? e, quand elle se sent coupable d'un autre crime que son coeur
ne peut se pardonner. Le tonnerre se fait entendre, l'e? pouvante
s'empare du peuple, Jeanne d'Arc est bannie de l'empire qu'elle
vient de sauver. Nul n'ose s'approcher d'elle. La foule se disperse;
l'infortune? e sort de la ville ;- elle erre dans la campagne, et lors-
que, abi^me? e de fatigue, elle accepte une boisson rafrai^chissante,
un enfant qui la reconnai^t arrache de ses mains ce faible soula-
gement. On dirait que le souffle infernal dont on la croit envi-
ronne? e peut souiller tout ce qu'elle touche, et pre? cipiter dans
l'abi^me e? ternel quiconque oserait la secourir. Enfin, poursuivie
? ? Generated for (University of Chicago) on 2014-12-22 00:49 GMT / http://hdl. handle. net/2027/hvd. hwnks5 Public Domain, Google-digitized / http://www. hathitrust. org/access_use#pd-google
? JEANNE D'ARC. 239
d'asile en asile, la libe? ratrice de la France tombe au pouvoir de
ses ennemis.
Jusque-la` cette trage? die romantique, c'est ainsi que Schiller
l'a nomme? e, est remplie de beaute? s du premier ordre; on peut
bien y trouver quelques longueurs (jamais les auteurs allemands
ne sont exempts de ce de? faut); mais on voit passer devant soi
des e? ve? nements si remarquables, que l'imagination s'exalte a`
leur hauteur, et que, ne jugeant plus cette pie`ce comme ou-
vrage de l'art, on conside`re le merveilleux tableau qu'elle ren-
ferme comme un nouveau reflet de la sainte inspiration de l'he? -
roi? ne. Le seul de? faut grave qu'on puisse reprocher a` ce drame
lyrique, c'est le de? nou^ment : au lieu de prendre celui qui e? tait
donne? par l'histoire, Schiller suppose que Jeanne d'Arc, en-
chai^ne? e par les Anglais, brise miraculeusement ses fers, va
rejoindre le camp des Franc? ais, de? cide la victoire en leur faveur,
et rec? oit une blessure mortelle. Le merveilleux d'invention, a`
co^te? du merveilleux transmis par l'histoire, o^te a` ce sujet quel-
que chose de sa gravite? . D'ailleurs, qu'y avait-il de plus beau
que la conduite et les re? ponses me^mes de Jeanne d'Arc, lors-
qu'elle fut condamne? e a` Rouen par les grands seigneurs anglais
et les e? ve^ques normands?
L'histoire raconte que cette jeune fille re? unit le courage le
plus ine? branlable a` la douleur la plus touchante; elle pleurait
comme une femme, mais elle se conduisait comme un he? ros. On
l'accusa de s'e^tre livre? e a` des pratiques superstitieuses, et elle
repoussa cette inculpation avec les arguments dont une personne
e? claire? e pourrait se servir de nos jours; mais elle persista tou-
jours a` de? clarer qu'elle avait eu des re? ve? lations intimes, qui
l'avaient de? cide? e dans le choix de sa carrie`re. Abattue par l'hor-
reur du supplice qui la menac? ait, elle rendit constamment te? -
moignage devant les Anglais a` l'e? nergie des Franc? ais, aux vertus
du roi de France, qui cependant l'avait abandonne? e. Sa mort-
nc fut ni celle d'un guerrier ni celle d'un martyr; mais, a` travers
la douceur et la timidite? de son sexe, elle montra dans les der-
niers moments une force d'inspiration presque aussi e? tonnante
que celle dont on l'accusait comme d'une sorcellerie. Quoi qu'il
en soit, le simple re? cit de sa fin e? meut bien plus que le de? nou-
? ? Generated for (University of Chicago) on 2014-12-22 00:49 GMT / http://hdl. handle. net/2027/hvd. hwnks5 Public Domain, Google-digitized / http://www. hathitrust. org/access_use#pd-google
? 240 LA FIANCE? E DE MESSINE.
ment de Schiller. Lorsque la poe? sie veut ajouter a` l'e? clat d'un
personnage historique, il faut du moins qu'elle lui conserve
avec soin la physionomie qui le caracte? rise; car la grandeur
n'est vraiment frappante que quand on sait lui donner l'air na-
turel. Or, dans le sujet de Jeanne d'Arc, c'est le fait ve? ritable
qui non-seulement a plus de naturel, mais plus de grandeur
que la fiction.
La Fiance? e de Messinea e? te? compose? e d'apre`sun syste`me dra-
matique tout a` fait diffe? rent de celui que Schiller avait suivi jus-
qu'alors, et auquel il est heureusement revenu. C'est pour faire
admettre les choeurs sur la sce`ne qu'il a choisi un sujet dans
lequel il n'y a de nouveau que les noms; car c'est, au fond, la
me^me chose que les Fre`res ennemis. Seulement Schiller a intro-
duit deplus une soeur dont les deux fre`res deviennent amoureux,
sans savoir qu'elle est leur soeur, et l'un tue l'autre par jalou-
sie. Cette situation terrible en elle-me^me est entreme^le? e de
choeurs qui font partie de la pie`ce. Ce sont les serviteurs des
deux fre`res qui interrompent et glacent l'inte? re^t par leurs dis-
cussions mutuelles. La poe? sie lyrique qu'ils re? citent tous a` la
fois est superbe; mais ils n'en sont pas moins, quoi qu'ils di-
sent, des choeurs de chambellans. Le peuple entier peut seul avoir cette dignite? inde? pendante, qui lui permet d'e^tre un spec-
tateur impartial. Le choeur doit repre? senter la poste? rite? . Si des
affections personnelles l'animaient, il serait ne? cessairement ri-
dicule; car on ne concevrait pas comment plusieurs personnes
diraient la me^me chose en me^me temps, si leurs voix n'e? taient
pas cense? es e^tre l'interpre`te impassible des ve? rite? s e? ternelles.
Schiller, dans la pre? face qui pre? ce`de la Fiance? e de Messine,
se plaint avec raison de ce que nos usages modernes n'ont plus
ces formes populaires qui les rendaient si poe? tiques chez les an-
ciens.
<< Les palais, dit-il, sont ferme? s; les tribunaux ne se tiennent
<< plus en plein air, devant les portes des villes; les e? crits ont
<< pris la place de la parole vivante; le peuple lui-me^me, cette
<< masse si forte et si visible, n'est presque plus qu'une ide? e abs-
<<traite, et les divinite? s des mortels n'existent plus que dans leur
? ?
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? LA FIANCEE DE MESSINE. 2-11
<<coeur. Il faut que le poete ouvre les palais, replace les juges
sous la vou^te du ciel, rele`ve les statues des dieux, ranime enfin
les images qui partout ont fait place aux ide? es. >>
Ce de? sir d'un autre temps, d'un autre pays, est un sentiment
poe? tique. L'homme religieux a besoin du ciel, et le poete d'une
autre terre : mais on ignore quel culte et quel sie`cle la Fian-
ce? e de Messine nous repre? sente: elle sort des usages modernes,
sans nous placer dans les temps antiques. Le poe`te y a me^le?
toutes les religions ensemble; et cette confusion de? truit la haute
unite? de la trage? die, celle de la destine? e qui conduit tout. Les
e? ve? nements sont atroces, et cependant l'horreur qu'ils inspirent
est tranquille. Le dialogue est aussi long, aussi de? veloppe? que
si l'affaire de tous e? tait deparler en beaux vers, et qu'on aima^t,
qu'on fu^t jaloux, qu'on hai? t son fre`re, qu'on le tua^t, sans quit-
ter la sphe`re des re? flexions ge? ne? rales et des sentiments philoso-
phiques.
Il y a ne? anmoins dans la Fiance? e de Messine des traces
admirables du beau ge? nie de Schiller. Quand l'un des fre`res a
e? te? tue? par son fre`re jaloux ,. on apporte le mort dans le palais
de la me`re; elle ne sait point encore qu'elle a perdu son fils,
et c'est ainsi que le choeur qui pre? ce`de le cercueil le lui an-
nonce:
<< De tout co^te? le malheur parcourt les villes. Il erre en si-
<< lence autour des habitations des hommes: aujourd'hui c'est
<< a` celle-ci qu'il frappe, demain c'est a` celle-la`; aucune n'est
? e? pargne? e. Le messager douloureux et funeste to^t ou tard pas-
? sera le seuil de la porte ou` demeure un vivant. Quand les
'? feuilles tombent dans la saison prescrite, quand les vieillards
<< affaiblis descendent dans le tombeau , la nature obe? it en paix
? a` ses antiques lois, a` son e? ternel usage, l'homme n'en est
? point effraye? ; mais sur cette terre, c'est le malheur impre? vu
qu'il faut craindre. Le meurtre, d'une main violente, brise
les liens les plus sacre? s, et la mort vient enlever dans la bar-
"que du Styx le jeune homme florissant. Quand les nuages
? amoncele? s couvrent le ciel de deuil, quand le tonnerre retentit
? dans les abi^mes, tous les coeurs sentent la force redoutable
? de la destine? e; mais la foudre enflamme? e peut partir des hau-
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? 242 LA FIANCE? E DE MESSINE.
<< teurs sans nuages, et le malheur s'approche comme un ennemi
<< ruse? , au milieu des jours de fe^te.
<< N'attache donc point ton coeur a` ces biens dont la vie passa-
<< ge`re est orne? e. Si tu jouis, apprends a` perdre, et si la fortune
<< est avec toi, songe a` la douleur. >>
Quand le fre`re apprend que celle dont il e? tait amoureux, et
pour laquelle il a tue? son fre`re, est sa soeur, son de? sespoir n'a
point de bornes, et il se re? sout a` mourir. Sa me`re veut lui par-
donner, sa soeur lui demande de vivre; mais il se me^le a` ses
remords un sentiment d'envie qui le rend encore jaloux de celui
qui n'est plus.
<< Ma me`re, dit-il, quand le me^me tombeau renfermera le
<< meurtrier et la victime, quand une me^me vou^te couvrira nos
<< cendres re? unies, ta male? diction sera de? sarme? e. Tes pleurs
<< couleront e? galement pour tes deux fils: la mort est un puis-
<<sant me? diateur! elle e? teint les flammes de la cole`re, elle re? -
<<concilie les ennemis, et la pitie? se penche comme une soeur
<< attendrie sur l'urne qu'elle embrasse. >>
Sa me`re le presse encore de ne pas l'abandonner. -- << Non ,
<< lui dit-il, je ne puis vivre avec un coeur brise? . Il faut que je
<< retrouve la joie, et que je m'unisse avec les esprits libres de
<< l'air. L'envie a empoisonne? ma jeunesse; cependant tu par-
<< tageais justement ton amour entre nous deux. Penses-tu que
<< je pusse supporter maintenant l'avantage que tes regrets ilon-
"uent a` mon fre`re sur moi? La mort nous sanctifie; dans son
>> palais indestructible, ce qui e? tait mortel et souille? se'change
<< en un cristal pur et brillant; les erreurs de la mise? rable hu-
<< manite? disparaissent. Mon fre`re serait au-dessus de moi dans
ton coeur, comme les e? toiles sontau-dessus de la terre, et l'an-
<<cienne rivalite? qui nous a se? pare? s pendant la vie, renai^trait pour
me de? vorer sans rela^che. 11 serait par dela` ce monde; il serait
<< dans ton souvenir l'enfant che? ri, l'enfant immortel. >>
La jalousie qu'inspire un mort est un sentiment plein de de? -
licatesse et de ve? rite? . Qui pourrait en effet triompher des regrets?
Les vivants e? galeront-ils jamais la beaute? de l'image ce? leste que
l'ami qui n'est plus a laisse? e dans notre coeur? Ne nous a-t-il
pas dit: -- Ne m'oubliez pas. -- i? \"est-il p;i^s la` sans de? fense? Ou`
/
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? GUILLAUME TELL. I? 43
vit-il sur cette terre, si ce n'est dans le sanctuaire de notre a^me?
Et qui, parmi les heureux de ce monde, s'unirait jamais a` nous
aussi intimement que son souvenir?
CHAPITRE XX. Guillaume Tell.
Le Cuillaume Tell de Schiller est reve^tu de ces couleurs vives
et brillantes qui transportent l'imagination dans les contre? es
pittoresques ou` la respectable conjuration du Ru`tli s'est passe? e.
De`s les premiers vers, on croit entendre re? sonner les cors des
Alpes. Ces nuages qui partagent les montagnes, et cachent la
terre d'en bas a` la terre plus voisine du ciel; ces chasseurs de
chamois poursuivant leur proie le? ge`re a` travers les abi^mes; cette
vie tout a` la fois pastorale et guerrie`re, qui combat avec la na-
ture, et reste en paix avec les hommes : tout inspire un inte? re^t
anime? pour la Suisse; et l'unite? d'action, dans cette trage? die,
tient a` l'art d'avoir fait de la nation me^me un personnage
dramatique.
La hardiesse de Tell est brillamment signale? e au premier acte
de la pie`ce. Un malheureux proscrit, que l'un des tyrans sub-
alternes de la Suisse a de? voue? a` la mort, veut se sauver del'au-tre co^te? du rivage, ou` il peut trouver un asile. L'orage est si
\ ioleat qu'aucun batelier n'ose se risquer a` traverser le lac pour
le conduire. Tell voit sa de? tresse, se hasarde avec lui sur les flots,
et le fait heureusement aborder a` l'autre rive. Tell est e? tranger
a` la conjuration que l'insolence de Gessler fait nai^tre. Stauffa-
cher, Walther Fu^rst et Arnold deMelchtal pre? parent la re? volte.
Tell en est le he? ros, mais non pas l'auteur; il ne pense point a`
la politique, il ne songe a` la tyrannie que quand elle trouble sa
vie paisible; il la repousse de son bras, quand il e? prouve son
atteinte; il la juge, il la condamne a` son propre tribunal; mais
il ne conspire pas. Arnold deMelchtal, l'un des conjure? s, s'est retire? chez Wal-
iher; il a e? te? oblige? de quitter son pe`re, pour e? chapper aux sa-
tellites de Gessler; il s'inquie`te de l'avoir laisse? seul; il demande
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? 2-M GUILLAUME TELL.
avec anxie? te? de ses nouvelles, quand tout a` coup il apprend que,
pour punir le vieillard de ce que son fils s'est soustrait au de? cret
lance? contre lui, les barbares, avec un fer bru^lant, l'ont prive?
de la vue. Quel de? sespoir, quelle rage peut e? galer ce qu'il e? prouve!
