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Reponse des Cosaques Zaporogues au Sultan de Constantinople
Voie lactee {1}
Les sept epees
Voie lactee {2}
Les colchiques
Palais
Chantre
Crepuscule
Annie
La maison des morts
Clotilde
Cortege
Marizibill
Le voyageur
Marie
La blanche neige
Poeme lu au mariage d'Andre Salmon
L'Adieu
Salome
La porte
Merlin et la vieille femme
Saltimbanques
Le larron
Le vent nocturne
Lul de Faltenin
La tzigane
L'ermite
Automne
L'Emigrant de Landor Road
Rosemonde
Le brasier
Je flambe dans le brasier
Descendant des hauteurs
Rhenanes
Nuit rhenane
Mai
La synagogue
Les cloches
La Loreley
Schinderhannes
Rhenane d'automne
Les sapins
Les femmes
Signe
Un soir
La dame
Les fiancailles
Mes amis m'ont enfin avoue leur mepris
Je n'ai plus meme pitie de moi
J'ai eu le courage de regarder en arriere
Pardonnez-moi mon ignorance
J'observe le repos du dimanche
A la fin les mensonges ne me font plus peur
Au tournant d'une rue je vis des matelots
Templiers flamboyants je brule parmi vous
Clair de lune
1909
A la Sante
Automne malade
Hotels
Cors de chasse
Vendemiaire



ZONE

A la fin tu es las de ce monde ancien

Bergere o tour Eiffel le troupeau des ponts bele ce matin

Tu en as assez de vivre dans l'antiquite grecque et romaine

Ici meme les automobiles ont l'air d'etre anciennes
La religion seule est restee toute neuve la religion
Est restee simple comme les hangars de Port-Aviation

Seul en Europe tu n'es pas antique o Christianisme
L'Europeen le plus moderne c'est vous Pape Pie X
Et toi que les fenetres observent la honte te retient
D'entrer dans une eglise et de t'y confesser ce matin
Tu lis les prospectus les catalogues les affiches qui chantent
tout haut
Voila la poesie ce matin et pour la prose il y a les journaux
Il y a les livraisons a 25 centimes pleines d'aventures policieres
Portraits des grands hommes et mille titres divers

J'ai vu ce matin une jolie rue dont j'ai oublie le nom
Neuve et propre du soleil elle etait le clairon
Les directeurs les ouvriers et les belles steno-dactylographes
Du lundi matin au samedi soir quatre fois par jour y passent
Le matin par trois fois la sirene y gemit
Une cloche rageuse y aboie vers midi
Les inscriptions des enseignes et des murailles
Les plaques les avis a la facon des perroquets criaillent
J'aime la grace de cette rue industrielle
Situee a Paris entre la rue Aumont-Thieville et l'avenue des
Ternes

Voila la jeune rue et tu n'es encore qu'un petit enfant
Ta mere ne t'habille que de bleu et de blanc
Tu es tres pieux et avec le plus ancien de tes camarades Rene
Dalize
Vous n'aimez rien tant que les pompes de l'Eglise
Il est neuf heures le gaz est baisse tout bleu vous sortez du
dortoir en cachette
Vous priez toute la nuit dans la chapelle du college
Tandis qu'eternelle et adorable profondeur amethyste
Tourne a jamais la flamboyante gloire du Christ
C'est le beau lys que tous nous cultivons
C'est la torche aux cheveux roux que n'eteint pas le vent
C'est le fils pale et vermeil de la douloureuse mere
C'est l'arbre toujours touffu de toutes les prieres
C'est la double potence de l'honneur et de l'eternite
C'est l'etoile a six branches
C'est Dieu qui meurt le vendredi et ressuscite le dimanche

C'est le Christ qui monte au ciel mieux que les aviateurs
Il detient le record du monde pour la hauteur

Pupille Christ de l'oeil
Vingtieme pupille des siecles il sait y faire
Et change en oiseau ce siecle comme Jesus monte dans l'air
Les diables dans les abimes levent la tete pour le regarder
Ils disent qu'il imite Simon Mage en Judee
Ils crient s'il sait voler qu'on l'appelle voleur
Les anges voltigent autour du joli voltigeur
Icare Enoch Elie Apollonius de Thyane
Flottent autour du premier aeroplane
Ils s'ecartent parfois pour laisser passer ceux que transporte la
Sainte-Eucharistie
Ces pretres qui montent eternellement elevant l'hostie
L'avion se pose enfin sans refermer les ailes
Le ciel s'emplit alors de millions d'hirondelles
A tire-d'aile viennent les corbeaux les faucons les hiboux
D'Afrique arrivent les ibis les flamants les marabouts
L'oiseau Roc celebre par les conteurs et les poetes
Plane tenant dans les serres le crane d'Adam la           tete
L'aigle fond de l'horizon en poussant un grand cri
Et d'Amerique vient le petit colibri
De Chine sont venus les pihis longs et souples
Qui n'ont qu'une seule aile et qui volent par couples
Puis voici la colombe esprit immacule
Qu'escortent l'oiseau-lyre et le paon ocelle
Le phenix ce bucher qui soi-meme s'engendre
Un instant voile tout de son ardente cendre
Les sirenes laissant les perilleux detroits
Arrivent en chantant bellement toutes trois
Et tous aigle phenix et pihis de la Chine
Fraternisent avec la volante machine

Maintenant tu marches dans Paris tout seul parmi la foule
Des troupeaux d'autobus mugissants pres de toi roulent
L'angoisse de l'amour te serre le gosier
Comme si tu ne devais jamais plus etre aime
Si tu vivais dans l'ancien temps tu entrerais dans un monastere
Vous avez honte quand vous vous surprenez a dire une priere
Tu te moques de toi et comme le feu de l'Enfer ton rire petille
Les etincelles de ton rire dorent le fond de ta vie
C'est un tableau pendu dans un sombre musee
Et quelquefois tu vas le regarder de pres

Aujourd'hui tu marches dans Paris les femmes sont ensanglantees
C'etait et je voudrais ne pas m'en souvenir c'etait au declin de
la beaute

Entouree de flammes ferventes Notre-Dame m'a regarde a Chartres
Le sang de votre Sacre-Coeur m'a inonde a Montmartre
Je suis malade d'ouir les paroles bienheureuses
L'amour dont je souffre est une maladie honteuse
Et l'image qui te possede te fait survivre dans l'insomnie et dans
l'angoisse
C'est toujours pres de toi cette image qui passe

Maintenant tu es au bord de la Mediterranee
Sous les citronniers qui sont en fleur toute l'annee
Avec tes amis tu te promenes en barque
L'un est Nissard il y a un Mentonasque et deux Turbiasques
Nous regardons avec effroi les poulpes des profondeurs
Et parmi les algues nagent les poissons images du Sauveur

Tu es dans le jardin d'une auberge aux environs de Prague
Tu te sens tout heureux une rose est sur la table
Et tu observes au lieu d'ecrire ton conte en prose
La cetoine qui dort dans le coeur de la rose

Epouvante tu te vois dessine dans les agates de Saint-Vit
Tu etais triste a mourir le jour ou tu t'y vis
Tu ressembles au Lazare affole par le jour
Les aiguilles de l'horloge du quartier juif vont a rebours
Et tu recules aussi dans ta vie lentement
En montant au Hradchin et le soir en ecoutant
Dans les tavernes chanter des chansons tcheques

Te voici a Marseille au milieu des pasteques

Te voici a Coblence a l'hotel du Geant

Te voici a Rome assis sous un neflier du Japon

Te voici a Amsterdam avec une jeune fille que tu trouves belle et
qui est laide
Elle doit se marier avec un etudiant de Leyde
On y loue des chambres en latin Cubicula locanda

Je m'en souviens j'y ai passe trois jours et autant a Gouda

Tu es a Paris chez le juge d'instruction
Comme un criminel on te met en etat d'arrestation

Tu as fait de douloureux et de joyeux voyages
Avant de t'apercevoir du mensonge et de l'age
Tu as souffert de l'amour a vingt et a trente ans
J'ai vecu comme un fou et j'ai perdu mon temps

Tu n'oses plus regarder tes mains et a tous moments je voudrais
sangloter
Sur toi sur celle que j'aime sur tout ce qui t'a epouvante
Tu regardes les yeux pleins de larmes ces pauvres emigrants
Ils croient en Dieu ils prient les femmes allaitent des enfants
Ils emplissent de leur odeur le hall de la gare Saint-Lazare
Ils ont foi dans leur etoile comme les rois-mages
Ils esperent gagner de l'argent dans l'Argentine
Et revenir dans leur pays apres avoir fait fortune
Une famille transporte un edredon rouge comme vous transportez
votre coeur
Cet edredon et nos reves sont aussi irreels
Quelques-uns de ces emigrants restent ici et se logent
Rue des Rosiers ou rue des Ecouffes dans des bouges
Je les ai vus souvent le soir ils prennent l'air dans la rue
Et se deplacent rarement comme les pieces aux echecs
Il y a surtout des Juifs leurs femmes portent perruque
Elles restent assises exsangues au fond des boutiques

Tu es debout devant le zinc d'un bar crapuleux
Tu prends un cafe a deux sous parmi les malheureux

Tu es la nuit dans un grand restaurant

Ces femmes ne sont pas mechantes elles ont des soucis cependant
Toutes meme la plus laide a fait souffrir son amant

Elle est la fille d'un sergent de ville de Jersey

Ses mains que je n'avais pas vues sont dures et gercees

J'ai une pitie immense pour les coutures de son ventre

J'humilie maintenant a une pauvre fille au rire horrible ma bouche

Tu es seul le matin va venir
Les laitiers font tinter leurs bidons dans les rues

La nuit s'eloigne ainsi qu'une belle Metive
C'est Ferdine la fausse ou Lea l'attentive

Et tu bois cet alcool brulant comme ta vie
Ta vie que tu bois comme une eau-de-vie

Tu marches vers Auteuil tu veux aller chez toi a pied
Dormir parmi tes fetiches d'Oceanie et de Guinee
Ils sont des Christ d'une autre forme et d'une autre croyance
Ce sont les Christ inferieurs des obscures esperances

Adieu Adieu

Soleil cou coupe


LE PONT MIRABEAU

Sous le pont Mirabeau coule la Seine
Et nos amours
Faut-il qu'il m'en souvienne
La joie venait toujours apres la peine.