--Je connais
Des vieilles qui s'en vont pleurant sous leurs bonnets
Parce qu'on leur a pris leur garcon ou leur fille:
C'est la crapule.
Des vieilles qui s'en vont pleurant sous leurs bonnets
Parce qu'on leur a pris leur garcon ou leur fille:
C'est la crapule.
Rimbaud - Poesie Completes
LE CHATIMENT DE TARTUFE
Tisonnant, tisonnant son coeur amoureux sous
Sa chaste robe noire, heureux, la main gantee,
Un jour qu'il s'en allait, effroyablement doux,
Jaune, bavant la foi de sa bouche edentee,
Un jour qu'il s'en allait, <<Oremus>>,--un Mechant
Le prit rudement par son oreille benoite
Et lui jeta des mots affreux, en arrachant
Sa chaste robe noire autour de sa peau moite!
Chatiment! . . . Ses habits etaient deboutonnes,
Et le long chapelet des peches pardonnes
S'egrenant dans son coeur, Saint Tartufe etait pale! . . .
Donc, il se confessait, priait, avec un rale!
L'homme se contenta d'emporter ses rabats. . .
--Peuh! Tartufe etait nu du haut jusques en bas!
A LA MUSIQUE
_Place de la Gare, a Charleville. _
Sur la place taillee en mesquines pelouses,
Square ou tout est correct, les arbres et les fleurs,
Tous les bourgeois poussifs qu'etranglent les chaleurs
Portent, les jeudis soirs, leurs betises jalouses.
Un orchestre guerrier, au milieu du jardin,
Balance ses schakos dans la Valse des fifres:
On voit, aux premiers rangs, parader le gandin,
Les notaires montrent leurs breloques a chiffres:
Des rentiers a lorgnons soulignent tous les couacs;
Les gros bureaux bouffis trainent leurs grosses dames,
Aupres desquelles vont, officieux cornacs,
Celles dont les volants ont des airs de reclames;
Sur les bancs verts, des clubs d'epiciers retraites
Qui tisonnent le sable avec leur canne a pomme,
Fort serieusement discutent des traites,
Puis prisent en argent, mieux que monsieur Prud'homme!
Etalant sur un banc les rondeurs de ses reins,
Un bourgeois bienheureux, a bedaine flamande,
Savoure, s'abimant en des reves divins,
La musique francaise et la pipe allemande!
Au bord des gazons frais ricanent les voyous;
Et, rendus amoureux par le chant des trombones,
Tres naifs, et fumant des roses, des pioupious
Caressent les bebes pour enjoler les bonnes. . .
--Moi, je suis, debraille comme un etudiant,
Sous les marronniers verts les alertes fillettes:
Elles le savent bien, et tournent en riant,
Vers moi, leurs yeux tout pleins de choses indiscretes.
Je ne dis pas un mot: je regarde toujours
La chair de leurs cous blancs brodes de meches folles;
Je suis, sous leur corsage et les freles atours,
Le dos divin apres la courbe des epaules. . .
Je cherche la bottine. . . et je vais jusqu'aux bas;
Je reconstruis le corps, brule de belles fievres.
Elles me trouvent drole et se parlent tout bas. . .
--Et je sens les baisers qui me viennent aux levres. . .
LE FORGERON
_Palais des Tuileries, vers le 10 aout 92. _
Le bras sur un marteau gigantesque, effrayant
D'ivresse et de grandeur, le front vaste, riant
Comme un clairon d'airain, avec toute sa bouche,
Et prenant ce gros-la dans son regard farouche,
Le Forgeron parlait a Louis Seize, un jour
Que le Peuple etait la, se tordant tout autour,
Et sur les lambris d'or trainant sa veste sale.
Or le bon roi, debout sur son ventre, etait pale,
Pale comme un vaincu qu'on prend pour le gibet,
Et, soumis comme un chien, jamais ne regimbait,
Car ce maraud de forge aux enormes epaules
Lui disait de vieux mots et des choses si droles,
Que cela l'empoignait au front, comme cela!
<<Or, tu sais bien, Monsieur, nous chantions tra la la
Et nous piquions les boeufs vers les sillons des autres:
Le Chanoine au soleil filait des patenotres
Sur des chapelets clairs grenes de pieces d'or.
Le Seigneur, a cheval, passait, sonnant du cor
Et l'un avec la hart, l'autre avec la cravache
Nous fouillaient. --Hebetes comme des yeux de vache,
Nos yeux ne pleuraient plus; nous allions, nous allions
Et quand nous avions mis le pays en sillons,
Quand nous avions laissee dans cette terre noire
Un peu de notre chair. . . nous avions un pourboire:
On nous faisait flamber nos taudis dans la nuit,
Nos petits y faisaient un gateau fort bien cuit.
. . . <<Oh! je ne me plains pas. Je te dis mes betises,
C'est entre nous. J'admets que tu me contredises,
Or, n'est-ce pas joyeux de voir, au mois de juin
Dans les granges entrer des voitures de foin
Enormes? De sentir l'odeur de ce qui pousse,
Des vergers quand il pleut un peu, de l'herbe rousse?
De voir des bles, des bles, des epis pleins de grain,
De penser que cela prepare bien du pain. . .
Oh! plus fort, on irait, au fourneau qu'il s'allume,
Chanter joyeusement en martelant l'enclume,
Si l'on etait certain de pouvoir prendre un peu,
Etant homme, a la fin! de ce que donne Dieu!
<<Mais voila, c'est toujours la meme vieille histoire! . . .
Mais je sais, maintenant! Moi je ne peux plus croire,
Quand j'ai deux bonnes mains, mon front et mon marteau
Qu'un homme vienne la, dague sur le manteau,
Et me dise: Mon gars, ensemence ma terre;
Que l'on arrive encor, quand ce serait la guerre,
De prendre mon garcon comme cela, chez moi!
--Moi, je serais un homme, et toi, tu serais roi,
Tu me dirais: Je veux! . . . --Tu vois bien, c'est stupide.
Tu crois que j'aime voir ta baraque splendide,
Tes officiers dores, tes mille chenapans,
Tes palsembleu batards tournant comme des paons:
Ils ont rempli ton nid de l'odeur de nos filles
Et de petits billets pour nous mettre aux Bastilles
Et nous dirons: C'est bien; les pauvres a genoux!
Nous dorerons ton Louvre en donnant nos gros sous!
Et tu te souleras, tu feras belle fete.
--Et ces Messieurs riront, les reins sur notre tete!
<<Non. Ces saletes-la datent de nos papas!
Oh! Le Peuple n'est plus une putain. Trois pas
Et, tous, nous avons mis ta Bastille en poussiere.
Cette bete suait du sang a chaque pierre
Et c'etait degoutant, la Bastille debout
Avec ses murs lepreux qui nous racontaient tout
Et, toujours, nous tenaient enfermes dans leur ombre!
--Citoyen! citoyen! c'etait le passe sombre
Qui croulait, qui ralait, quand nous primes la tour
Nous avions quelque chose au coeur comme l'amour.
Nous avions embrasse nos fils sur nos poitrines.
Et, comme des chevaux, en soufflant des narines
Nous allions, fiers et forts, et ca nous battait la. . .
Nous marchions au soleil, front haut; comme cela,
Dans Paris! On venait devant nos vestes sales.
Enfin! Nous nous sentions Hommes! Nous etions pales
Sire, nous etions souls de terribles espoirs:
Et quand nous fumes la, devant les donjons noirs,
Agitant nos clairons et nos feuilles de chene,
Les piques a la main; nous n'eumes pas de haine,
--Nous nous sentions si forts, nous voulions etre doux!
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
<<Et depuis ce jour-la, nous sommes comme fous!
Le tas des ouvriers a monte dans la rue,
Et ces maudits s'en vont, foule toujours accrue
De sombres revenants, aux portes des richards.
Moi, je cours avec eux assommer les mouchards:
Et je vais dans Paris, noir, marteau sur l'epaule,
Farouche, a chaque coin balayant quelque drole,
Et, si tu me riais au nez, je te tuerais!
--Puis, tu peux y compter, tu te feras des frais
Avec tes hommes noirs, qui prennent nos requetes
Pour se les renvoyer comme sur des raquettes
Et, tout bas, les malins se disent; <<Qu'ils sont sots! >>
Pour mitonner des lois, coller de petits pots
Pleins de jolis decrets roses et de droguailles,
S'amuser a couper proprement quelques tailles,
Puis se boucher le nez quand nous marchons pres d'eux
--Nos doux representants qui nous trouvent crasseux!
Pour ne rien redouter, rien, que les baionnettes. . . ,
C'est tres bien. Foin de leur tabatiere a sornettes!
Nous en avons assez, la, de ces cerveaux plats
Et de ces ventres-dieux. Ah! ce sont la les plats
Que tu nous sers bourgeois, quand nous sommes feroces
Quand nous brisons deja les sceptres et les crosses! . . .
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
Il le prend par le bras, arrache le velours
Des rideaux, et lui montre en bas les larges cours
Ou fourmille, ou fourmille, ou se leve la foule,
La foule epouvantable avec des bruits de houle
Hurlant comme une chienne, hurlant comme une mer,
Avec ses batons forts et ses piques de fer,
Ses tambours, ses grands cris de halles et de bouges,
Tas sombre de haillons saignants de bonnets rouges;
L'Homme, par la fenetre ouverte, montre tout
Au roi pale, et suant qui chancelle debout,
Malade a regarder cela!
<<C'est la crapule,
Sire. Ca bave aux murs, ca monte, ca pullule:
--Puisqu'ils ne mangent pas, Sire, ce sont des gueux!
Je suis un forgeron: ma femme est avec eux,
Folle! Elle croit trouver du pain aux Tuileries!
--On ne veut pas de nous dans les boulangeries.
J'ai trois petits. Je suis crapule.
--Je connais
Des vieilles qui s'en vont pleurant sous leurs bonnets
Parce qu'on leur a pris leur garcon ou leur fille:
C'est la crapule. --Un homme etait a la Bastille,
Un autre etait forcat: et, tous deux, citoyens
Honnetes. Liberes, ils sont comme des chiens:
On les insulte! Alors, ils ont la quelque chose
Qui leur fait mal, allez! C'est terrible, et c'est cause
Que, se sentant brises, que, se sentant damnes,
Ils sont la, maintenant, hurlant sous votre nez!
Crapule. --La dedans sont des filles, infames
Parce que,--vous saviez que c'est faible, les femmes,
Messeigneurs de la cour,--que ca veut toujours bien,
Vous avez crache sur l'ame, comme rien!
Vos belles, aujourd'hui, sont la. C'est la crapule.
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
<<Oh! tous les malheureux, tous ceux dont le dos brule
Sous le soleil feroce, et qui vont, et qui vont,
Qui dans ce travail-la sentent crever leur front.
Chapeau bas, mes bourgeois! Oh! ceux-la sont les Hommes!
Nous sommes Ouvriers, Sire! Ouvriers! Nous sommes
Pour les grands temps nouveaux ou l'on voudra savoir,
Ou l'Homme forgera du matin jusqu'au soir,
Chasseur des grands effets, chasseur des grandes causes
Ou, lentement vainqueur, il domptera les choses
Et montera sur Tout, comme sur un cheval!
Oh! splendides lueurs des forges! Plus de mal,
Plus! --Ce qu'on ne sait pas, c'est peut-etre terrible:
Nous saurons! --Nos marteaux en main; passons au crible
Tout ce que nous savons: puis, Freres, en avant!
Nous faisons quelquefois ce grand reve emouvant
De vivre simplement, ardemment, sans rien dire
De mauvais, travaillant sous l'auguste sourire
D'une femme qu'on aime avec un noble amour:
Et l'on travaillerait fierement tout le jour,
Ecoutant le devoir comme un clairon qui sonne:
Et l'on se sentirait tres heureux: et personne
Oh! personne, surtout, ne vous ferait ployer!
On aurait un fusil au-dessus du foyer. . .
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
Oh! mais l'air est tout plein d'une odeur de bataille!
Que te disais-je donc? Je suis de la canaille!
Il reste des mouchards et des accapareurs.
Nous sommes libres, nous! Nous avons des terreurs
Ou nous nous sentons grands, oh! si grands! Tout a l'heure
Je parlais de devoir calme, d'une demeure. . .
Regarde donc le ciel! --C'est trop petit pour nous,
Nous creverions de chaud, nous serions a genoux!
Regarde donc le ciel! --Je rentre dans la foule
Dans la grande canaille effroyable qui roule,
Sire, tes vieux canons sur les sales paves;
--Oh! quand nous serons morts, nous les aurons laves.
--Et si, devant nos cris, devant notre vengeance,
Les pattes des vieux rois mordores, sur la France
Poussaient leurs regiments en habits de gala,
Eh bien, n'est-ce pas, vous tous? Merde a ces chiens-la
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
--Il reprit son marteau sur l'epaule.
La foule
Pres de cet homme-la se sentait l'ame soule,
Et, dans la grande cour, dans les appartements,
Ou Paris haletait avec des hurlements,
Un frisson secoua l'immense populace.
Alors, de sa main large et superbe de crasse
Bien que le roi ventru suat, le Forgeron,
Terrible, lui jeta le bonnet rouge au front!
SOLEIL ET CHAIR
Le Soleil, le foyer de tendresse et de vie,
Verse l'amour brulant a la terre ravie,
Et, quand on est couche sur la vallee, on sent
Que la terre est nubile et deborde de sang;
Que son immense sein, souleve par une ame,
Est d'amour comme dieu, de chair comme la femme,
Et qu'il renferme, gros de seve et de rayons,
Le grand fourmillement de tous les embryons!
Et tout croit, et tout monte!
O Venus, o Deesse!
Je regrette les temps de l'antique jeunesse,
Des satyres lascifs, des faunes animaux,
Dieux qui mordaient d'amour l'ecorce des rameaux
Et dans les nenufars baisaient la Nymphe blonde!
Je regrette les temps ou la seve du monde,
L'eau du fleuve, le sang rose des arbres verts
Dans les veines de Pan mettaient un univers!
Ou le sol palpitait, vert, sous ses pieds de chevre;
Ou, baisant mollement le clair syrinx, sa levre
Modulait sous le ciel le grand hymne d'amour;
Ou, debout sur la plaine, il entendait autour
Repondre a son appel la Nature vivante;
Ou, les arbres muets, bercant l'oiseau qui chante,
La terre bercant l'homme, et tout l'Ocean bleu
Et tous les animaux, aimaient, aimaient en Dieu!
Je regrette les temps de la grande Cybele
Qu'on disait parcourir, gigantesquement belle,
Sur un grand char d'airain, les splendides cites;
Son double sein versait dans les immensites
Le pur ruissellement de la vie infinie.
L'Homme sucait, heureux, sa mamelle benie,
Comme un petit enfant, jouant sur ses genoux.
--Parce qu'il etait fort, l'Homme etait chaste et doux.
Misere! Maintenant il dit: Je sais les choses,
Et va, les yeux fermes et les oreilles closes;
--Et pourtant, plus de dieux! plus de dieux! l'Homme est Roi!
L'Homme est Dieu! Mais l'Amour, voila la grande Foi!
Oh! si l'homme puisait encore a ta mamelle,
Grande mere des dieux et des hommes, Cybele;
S'il n'avait pas laisse l'immortelle Astarte
Qui jadis, emergeant dans l'immense clarte
Des flots bleus, fleur de chair que la vague parfume,
Montra son nombril rose ou vint neiger l'ecume,
Et fit chanter, Deesse aux grands yeux noirs vainqueurs,
Le rossignol aux bois et l'amour dans les coeurs!
II
Je crois en toi! Je crois en toi! Divine mere,
Aphrodite marine! --Oh! la route est amere
Depuis que l'autre Dieu nous attelle a sa croix;
Chair, Marbre, Fleur, Venus, c'est en toi que je crois!
--Oui l'Homme est triste et laid, triste sous le ciel vaste,
Il a des vetements, parce qu'il n'est plus chaste,
Parce qu'il a sali son fier buste de Dieu,
Et qu'il a rabougri, comme une idole au feu,
Son corps olympien aux servitudes sales!
Oui, meme apres la mort, dans les squelettes pales
Il veut vivre, insultant la premiere beaute!
--Et l'Idole ou tu mis tant de virginite,
Ou tu divinisas notre argile, la Femme,
Afin que l'homme put eclairer sa pauvre ame
Et monter lentement, dans un immense amour,
De la prison terrestre a la beaute du jour,
La femme ne sait plus meme etre courtisane!
--C'est une bonne farce! et le monde ricane
Au nom doux et sacre de la grande Venus!
III
Si les temps revenaient, les temps qui sont venus!
--Car l'Homme a fini! l'Homme a joue tous les roles!
Au grand jour, fatigue de briser des idoles
Il ressuscitera, libre de tous ses Dieux,
Et, comme il est du ciel, il scrutera les cieux!
L'Ideal, la pensee invincible, eternelle,
Tout le dieu qui vit, sous son argile charnelle,
Montera, montera, brulera sous son front!
Et quand tu le verras sonder tout l'horizon,
Contempteur des vieux jougs, libre de toute crainte,
Tu viendras lui donner la Redemption sainte!
--Splendide, radieuse, au sein des grandes mers
Tu surgiras, jetant sur le vaste Univers
L'Amour infini dans un infini sourire!
Le Monde vibrera comme une immense lyre
Dans le fremissement d'un immense baiser:
--Le Monde a soif d'amour: tu viendras l'apaiser.
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
IV
O splendeur de la chair! o splendeur ideale!
O renouveau d'amour, aurore triomphale
Ou, courbant a leurs pieds les Dieux et les Heros
Kallipige la blanche et le petit Eros
Effleureront, couverts de la neige des roses,
Les femmes et les fleurs sous leurs beaux pieds ecloses!
O grande Ariadne, qui jettes tes sanglots
Sur la rive, en voyant fuir la-bas sur les flots,
Blanche sous le soleil, la voile de Thesee,
O douce vierge enfant qu'une nuit a brisee,
Tais-toi! Sur son char d'or brode de noirs raisins,
Lysios, promene dans les champs Phrygiens
Par les tigres lascifs et les pantheres rousses,
Le long des fleuves bleus rougit les sombres mousses.
Zeus, Taureau, sur son cou berce comme un enfant
Le corps nu d'Europe, qui jette son bras blanc
Au cou nerveux du Dieu frissonnant dans la vague,
Il tourne lentement vers elle son oeil vague;
Elle, laisse trainer sa pale joue en fleur
Au front de Zeus; ses yeux sont fermes; elle meurt
Dans un divin baiser, et le flot qui murmure
De son ecume d'or fleurit sa chevelure.
--Entre le laurier-rose et le lotus jaseur
Glisse amoureusement le grand Cygne reveur
Embrassant la Leda des blancheurs de son aile;
--Et tandis que Cypris passe, etrangement belle,
Et, cambrant les rondeurs splendides de ses reins,
Etale fierement l'or de ses larges seins
Et son ventre neigeux brode de mousse noire,
--Heracles, le Dompteur, qui, comme d'une gloire
Fort, ceint son vaste corps de la peau du lion,
S'avance, front terrible et doux, a l'horizon!
Par la lune d'ete vaguement eclairee,
Debout, nue, et revant dans sa paleur doree
Que tache le flot lourd de ses longs cheveux bleus,
Dans la clairiere sombre ou la mousse s'etoile,
La Dryade regarde au ciel silencieux. . .
